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Mettre en place un encadrement plus strict des évolutions de prix

Publié le 6 février 2024

Encadrer la possibilité, prévue par l’article L. 224-10 du code de la consommation, de modifier unilatéralement le contrat; plafonner les prix en cas d’augmentation important; interdire expressément les offres dont le prix n’est pas connu au moment de la consommation


Encadrer la possibilité, prévue par l’article L. 224-10 du code de la consommation, de modifier unilatéralement le contrat

L’article L.224-10 du code de la consommation prévoit que « tout projet de modification envisagé par le fournisseur des conditions contractuelles est communiqué au consommateur par voie postale ou, à sa demande, par voie électronique, au moins un mois avant la date d’ application envisagée. En matière d’électricité ou de gaz, les projets envisagés de modification des dispositions contractuelles relatives aux modalités de détermination du prix de la fourniture, ainsi que les raisons, les conditions préalables et la portée de cette modification sont communiqués de manière transparente et compréhensible.

Cette communication est assortie d’une information précisant au consommateur qu’il peut résilier le contrat sans pénalité, dans un délai maximal de trois mois à compter de sa réception.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux modifications contractuelles imposées par la loi ou le règlement ».

Cette disposition, qui permet de déroger au principe que toute modification d’un contrat doit faire l’objet d’un accord des deux parties, a permis d’assouplir les conditions dans lesquelles les fournisseurs d’énergie peuvent faire évoluer leurs tarifs ; mais elle a donné lieu à des applications et à des interprétations particulièrement défavorables pour les consommateurs.

  • Certains fournisseurs ont également proposé de manière systématique des offres avec une activation différée dont les prix étaient très (trop) attractifs, et qu’ils ont été augmentés substantiellement une fois le contrat activé.
  • Certains fournisseurs ont même tenté, en se fondant sur cette disposition, de modifier le prix appliqué en vertu de contrats de fourniture d’énergie conclus à un prix fixe pour une période déterminée !

De même, il y a lieu de s’interroger sur la pratique consistant à faire évoluer les conditions d’indexation des prix en se fondant sur les dispositions de l’article L. 224-10 du code de la consommation ; de nombreux fournisseurs d’énergie ont ainsi informé leurs clients un mois avant sa mise en application de la modification des conditions d’indexation des prix, pour passer d’une indexation sur les tarifs réglementés à une indexation sur les prix des marchés de gros (EPEX SPOT par exemple) ; une telle modification des conditions contractuelles a eu, comme on l’a constaté avec la crise des prix de l’énergie, des conséquences très importantes sur le prix payé par le consommateur.

Le médiateur national de l’énergie propose donc de modifier l’article L. 224-10 du code de la consommation, afin de mieux protéger les consommateurs d’énergie :

  1. Des principes de sécurité juridique et de prévisibilité des relations contractuelles, il découle des principes de sécurité juridique et de prévisibilité des relations contractuelles que cet article L. 224-10 du code de la consommation ne devrait faire obstacle à une certaine stabilité des prix que le consommateur est en droit d’attendre lorsqu’il s’agit d’un bien de première nécessité. Pour empêcher des pratiques contestables, comme la formulation d’une offre particulièrement attractive suivie de l’utilisation de l’article L. 224-10 du code de la consommation pour la modifier, il pourrait être prévu d’interdire aux fournisseurs d’y avoir recours pendant l’année qui suit (ou les six premiers mois). De manière générale, il apparaitrait opportun de s’interroger sur un mécanisme de « capage » (plafonnement) de la hausse du prix de l’énergie lorsqu’elle intervient en cours de contrat.
  2. Il ne devrait pas être possible de passer d’un contrat à prix fixe à un contrat à prix indexé ou de modifier l’indice de référence d’un contrat à prix indexé en se fondant sur l’article L. 224-10 du code de la consommation. Cette modification constitue en effet une modification substantielle de l’équilibre du contrat, car elle revient à faire peser l’intégralité du risque du coût d’approvisionnement en énergie sur le consommateur final et lui fait courir un risque important en cas de forte évolution des prix sur les marchés de gros. Il ne s’agit pas alors d’une simple modification du contrat, mais bien d’un nouveau contrat.

Il est donc proposé de ne plus permettre la modification des conditions d’indexation des prix en se fondant sur les dispositions de l’article L. 224-10 du code de la consommation. Dans un tel cas, il sera nécessaire de recueillir le consentement explicite du consommateur, à l’instar de ce qui est prévu pour les offres à tarification dynamique par l’article L. 332-7 du code de l’énergie (« IV.-Le fournisseur recueille le consentement du client avant de passer à un contrat à tarification dynamique ») ;.

A défaut d’une telle interdiction, le médiateur national de l’énergie rappelle que, lorsque le changement contractuel porte sur une modification des conditions d’indexation pour prévoir une indexation sur les prix de marché, le fournisseur a l’obligation de se conformer aux prescriptions du 4ème alinéa de l’article L. 224-3 du code de la consommation :

« L’offre de fourniture d’électricité ou de gaz naturel précise, dans des termes clairs et compréhensibles, les informations suivantes :

4° Les prix de ces produits et services à la date de l’offre ainsi que, le cas échéant, les conditions d’évolution de ces prix, y compris les moyens par lesquels sont rendues disponibles les informations actualisées sur l’ensemble des tarifs applicables. Pour les offres dont le prix, fixé librement, est indexé sur les cours de marché selon une périodicité n’excédant pas un trimestre ou les offres à tarification dynamique mentionnées à l’article L. 332-7 du code de l’énergie, les opportunités, les coûts et les risques liés à ces types d’offres sont précisés dans des termes clairs et compréhensibles, notamment au regard de leur exposition à la volatilité des prix (…) »

Plafonner les prix en cas d’augmentation importante

Dans le contexte de crise de l’énergie, de nombreux consommateurs ont vu les tarifs de leurs contrats de fourniture d’énergie augmenter au cours de l’année 2022 de façon substantielle, et parfois même insupportable. S’agissant de produits de première nécessité (l’électricité) ou difficilement substituables (le gaz), une hausse importante de leur prix a des conséquences importantes sur les consommateurs domestiques, mais aussi, on l’a vu, sur les professionnels.

Le médiateur national de l’énergie propose qu’au-delà d’une certaine augmentation en cours de contrat, le prix soit plafonné. Il suggère, sur un plan plus général, que soit engagée une réflexion sur la possibilité́ de plafonner toute augmentation de prix en cours de contrat de fourniture d’énergie.

Interdire expressément les offres dont le prix n’est pas connu au moment de la consommation

Le médiateur national de l’énergie, qui gère en application de la loi un comparateur d’offres d’énergie a constaté que plusieurs offres qui y étaient proposées ne permettaient pas au consommateur de connaître au moment où il la consomme le prix de l’énergie qui va lui être facturée. Certaines offres sont, en effet, indexées sur un prix de marché qui n’est connu qu’a posteriori, car l’indice retenu pour la facturation est celui du mois au cours duquel la consommation a lieu. Cette pratique méconnaît le principe de base selon lequel le client doit toujours connaître le prix du produit qu’il achète.

D’ailleurs, l’article L. 112-3 du code de la consommation prévoit que « Lorsque le prix ne peut être raisonnablement calculé à l’avance du fait de la nature du bien ou du service, le professionnel fournit le mode de calcul du prix et, s’il y a lieu, tous les frais supplémentaires de transport, de livraison ou d’affranchissement et tous les autres frais éventuels. Lorsque les frais supplémentaires ne peuvent raisonnablement être calculés à l’avance, le professionnel mentionne qu’ils peuvent être exigibles » ; de plus, la Cour de cassation a jugé que lorsque le prix, quoique déterminable selon une procédure choisie d’un commun accord, demeure inconnu et que la procédure de détermination du prix n’a pas été engagée, la vente ne peut être déclarée parfaite et son application mise en oeuvre (Cass. 3e civ. 12 septembre 2006).

Le médiateur national de l’énergie propose donc qu’il soit rappelé, au besoin par la loi, que soient interdites les offres de fourniture d’énergie dans lesquelles le consommateur ne connaît le prix de ce qu’il consomme qu’après avoir consommé.

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